Le challenge pour vous amener nos gambas vivantes
Depuis la fin juillet, nous avons repris nos ventes de gambas pour la saison 2022. Mais savez-vous ce qu’elles ont enduré pour vous parvenir ? Quel temps s’est écoulé entre sortie de l’eau et mise à disposition de la clientèle ?
Plusieurs facteurs sont à considérer pour éviter des complications de survie. Eh oui, c’est surtout cela la difficulté de vous livrer nos délicieux crustacés tout en restant « vivants » hors de l’eau !
La température est probablement le facteur le plus important pour ne pas créer de grosses perturbations d’ordre physiologiques (métabolisme interne). Elle détermine bien d’autres facteurs pouvant occasionner bien des préjudices, comme la perte accélérée d’oxygène ou encore des réactions chimiques dans l’eau plus rapides. Cependant, il y a des limites à ne pas dépasser ...encore faut-il y aller doucement. En effet, si vous changez brusquement la température de quelques degrés vers le haut ou vers le bas, vous créez un traumatisme pour la pauvre crevette qui n’a pas d’autre choix que de s’adapter ou de passer de l’autre côté (celui de la ...casserole).
Ainsi lorsqu’il fait très chaud et que vous sortez les animaux de l’eau des étangs, celle-ci est généralement plus basse que la température de l’air ambiant. Ainsi, nous devons agir très vite pour les replonger dans une eau, comme celle d’un dégorgeoir, sensiblement plus fraîche/froide, en évitant de grosses différences.
Il y a 20 ans, nous avions recouvert nos dégorgeoirs avec une toiture en charpente et nous pouvons vous dire qu’en règle générale l’eau s’y trouve plus tempérée. En effet, les rayons du soleil ne frappent plus directement la surface du plan d’eau. De plus, nous avons laissé délibérément tous les côtés ouverts de façon à ce que le vent puisse rafraîchir d’avantage cette masse d’eau.
L’oxygène est également un facteur extrêmement limitant, car si vous concentrez beaucoup d’animaux dans un même volume d’eau, il faut ajouter un aérateur pour en produire plus. La mortalité se déclare si les crevettes ne réussissent pas à sécuriser l’oxygène vital pour assurer leurs fonctions élémentaires. En effet, l’oxygène est nécessaire pour mener à bien le développement cellulaire au niveau des muscles, chitine1 pour sa carapace, digestion des aliments, reproduction, etc.
Autre paramètre essentiel : la qualité de l’eau qui les reçoit. Celle-ci se dégrade avec la charge de matériel organique qui s’y accumule. Ainsi, les micro-organismes, les bactéries ou le phytoplancton sont tous demandeurs d’oxygène ...qui au final concurrencent grandement nos crustacés.
D’où l’importance de renouveler l’eau dans laquelle ils baignent ou en mettant en place un système efficace de filtration.
Un détail qui a son poids dans la survivance lorsqu’on pêche des gambas est de ne jamais laisser trop longtemps les filets de récolte ...sans les réviser. En effet, les crevettes peuvent s’accumuler dans les poches aux extrémités de ces filets. Si vous oubliez de les récupérer rapidement, elles peuvent s’entasser jusqu’à ne plus pouvoir circuler librement. Elles passent alors leur temps à se frotter les unes aux autres en provoquant beaucoup de gêne et de nombreux télescopages qui les affecteront durant des heures pouvant conduire à de la mortalité chez les sujets les plus faibles.
Enfin, et non des moindres, la manipulation elle-même des animaux doit être minimale : traitez ceux-ci avec délicatesse, sans les brusquer ...avec des gestes doux, sans les maltraiter ...et vous verrez que tout ira bien. Combien de fois ne prenons nous pas le temps (...donner du temps au temps !) de bien les traiter. Parfois en les prenant délicatement, les crevettes peuvent rester tranquillement sur votre main ...sans sauter dans tous les sens. Dans le cas contraire, elles peuvent dépenser une grande énergie pour retrouver un milieu plus propice ...afin d’en finir avec le « mauvais » moment ...une énergie qui devrait être canalisée à des fins plus intéressantes !
Quant au conditionnement pour les ventes en direct, l’éloignement des points de ventes influence beaucoup. Ainsi pour acheminer des gambas vivantes sur les marchés régionaux, il faut se lever avec 1-2h d’anticipation (travailler tôt le matin c’est-à-dire à des températures plus fraîches/froides). Bien entendu, cela dépend des quantités à manipuler et de l’importance des commandes.
Lorsqu’il s’agit de ventes lointaines, le conditionnement prend plus de temps encore, car les gambas doivent parcourir un minimum de 500 Km avant d’être mises en ventes. Par conséquent, elles sont tenues de résister aux secousses du voyage et aux conditions parfois peu favorables sur les lieux de livraison. C'est la raison pour laquelle on les emballe selon un agencement spécial, dans des boites isothermes, en y ajoutant un peu de glace lorsque les températures sont trop élevées.
Lorsqu’on commercialise des gambas à partir d’octobre, les températures normalement plus basses de la saison permettent aux gambas de rester en vie hors de leur milieu naturel (l’eau de mer) plus longtemps (2-3 jours, voir plus). Par contre si les conditions sont peu favorables, les gambas ne résistent parfois pas plus d’une dizaine d’heures après leur sortie de l’eau à la ferme.
De toute manière, il ne s’écoulera que quelques minutes, voir quelques heures, entre le moment de la pêche au dégorgeoir (à l’extérieur) ou au tank de refroidissement (à l’intérieur) et la livraison de vos gambas. Nous nous faisons un point d’honneur d’agir de la sorte ce qui met en valeur la fermeté de leur chair. Car n’oubliez pas que nos crevettes gastronomiques ont été élevées dans un environnement 100 % naturel ...sans engrais, sans aliment industriel et surtout en l’absence de tout traitement chimique sanitaire.
Il faut toutefois reconnaître que, depuis quelques années, les changements climatiques et perturbations météorologiques affectent énormément le business (en général, toute l’agriculture) et de temps à autres nous essuyons quelques pertes non négligeables. C’est aussi cela travailler avec les cycles biologiques qui nous donnent de temps à autres du fil à retordre dans les livraisons ...surtout lorsque nous devons honorer les commandes !
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1La chitine est un polysaccharide (sucre) azoté liés par des liaisons osidiques du type β-1,4 qui ne peuvent être en principe dégradées que par les enzymes bactériennes. Il s’agit d’un matériau résistant et souple, dur lorsqu'elle est associée à du carbonate de calcium. Elle constitue notamment les cuticules externes des insectes et les carapaces des crustacés.
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