Décryptage d'un monde mystérieux: instructifs U.S.A. (4)

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Classé dans : Formation Mots clés : éducation académique, emploi, USA

(4ième partie)

(Tous ces faits relatés ci-après remontent à déjà 35 ans)

     De retour en Europe, celui qui avait fait un tour du monde cherchait maintenant à s’améliorer académiquement en aquaculture. Dans les années 80, l’Europe n’était pas spécialement développée dans ce secteur de léducation en particulier. Après avoir vu les avantages qu'offraient certaines universités US pour se former, c’est donc naturellement qu’il s’est alors tourné vers les Etat-Unis d’Amérique.

     Il a dû donc se conformer aux conditions exigées pour y avoir accès et il lui fallut passer plusieurs tests dans un des collèges américains établis sur le vieux continent. Il le fit du côté de Bruxelles.

     Il y eût d’abord le T.O.E.F.L., le Test of English as Foreign Language, obligatoire pour tous ceux dont la langue maternelle n'était pas l'anglais.

     Ensuite, il y eut le G.R.E. (Graduate Record Examination) qui est un test d’admission au 3ième cycle universitaire toutes filières confondues.

     Enfin plus tard, il fallut se présenter à une épreuve en Advanced Biology” pour toutes les spécialisations concernant la biologie, l’agriculture et les sciences annexes dont faisaient partie les pêches, l’aquaculture et l’ichtyologie.

     Tous ces examens d’admission se faisaient bien-entendu en anglais et il fallait atteindre un minimum 500-600 points sur 800 (suivant les exigences des universités choisies) pour pouvoir être accepté au niveau des “Masters” c'est-à-dire au-delà des diplômes d'ingénieur et maîtrise française.

     On croit souvent connaître cette belle langue de Shakespeare, mais méfiez-vous ! Préparez-vous et entraînez-vous sur des exercices préalables, car elle est de loin plus difficile pour ses nombreuses subtilités. Vous pouvez acheter des syllabus et CDs pour y parvenir. De plus, l'ambassade des Etats-Unis (d'Amérique) peut aussi vous y aider, en consultant les catalogues sur toutes leurs universités par domaine de spécialisation ...même si aujourd'hui vous trouvez toutes ces informations sur le web.

     Néanmoins, celui qui s'était risqué à présenter tous ces examens ...y parvint et du premier coup. Donc, si ce fût possible pour lui, cela devrait l’être pour d’autres également, du moins si vous êtes réellement intéressé et avec ...un peu de motivation !

     Par conséquent, il fût heureux d’apprendre qu’Auburn University dans l’Alabama (état du sud des Etats-Unis) l’accepta en septembre 1983. C’est une université qu’il avait visitée et appréciée au début de son tour du monde. Depuis le milieu du XXième siècle, son "Department of Fisheries and Allied Aquacultures" (faculté des pêches et aquacultures d'outre-mer) assiste techniquement de nombreux pays tropicaux dans les sciences aquatiques. De plus entre les cours délivrés à Auburn, plusieurs professeurs se déplaçaient périodiquement en Amérique Latine, Afrique et Asie, créant ainsi un enseignement et des échanges réalistes et fructueux.

     Ce qui avait captivé l'intérêt du visiteur dans ces institutions éducatives était le fait que toute théorie exposée était inéluctablement mise en pratique au laboratoire (équipés d'instruments d'analyse des plus modernes) et/ou dans leur station expérimentale. L'avantage à Auburn, c'est qu'il y avait une dizaine de lacs de plusieurs hectares, plus de 500 petits étangs, une écloserie, ainsi que des serres abritant une unité pour la sélection génétique.

     Toutes ces infrastructures étaient mises à la disposition des étudiants qui devaient réaliser leurs pratiques de thèse (M.Sc.1) ou dissertation (Ph.D.2). En Europe, il n'avait jamais observé autant d'outils mis à leurs services !

     Il y avait aussi plusieurs professeurs qui étaient de véritables autorités nationales et qui avaient contribué à la mise en place de techniques et procédures particulières officielles. A Auburn, quelques uns étaient même reconnus par des organisations internationales et étaient parfois sollicités pour améliorer les connaissances dans certains pays qui souhaitaient développer l'aquaculture. Par conséquent, on pouvait certainement apprendre beaucoup en un minimum de temps !

     Ainsi, notre "redevenu" étudiant décida de prendre du temps avec tous ces spécialistes de haute voltige !

     En effet, c’est à partir de ce moment qu’il commença à mettre sérieusement de l’ordre dans ses idées et accumuler des connaissances essentielles dans ce mystérieux monde aquatique. Tous les cours suivis étaient passionnants et expliquaient tellement de phénomènes en relation avec l’expérience déjà acquise en Amérique Centrale.

     Parmi les cours imposés, en voici quelques uns qu'il suivit :

  • Chimie des eaux - donné par un professeur-chimiste mondialement connu (Prof. Claude E. Boyd), maître en équations d'oxydo-réductions dans l'eau, micro-concentrations des éléments aquatiques, logarithmes appliquées et analyses comparatives pour remédier aux excès ou déficiences d'ions chimiques dans les étangs et lacs; ...ce qu'il n'a pas souffert avec cet enseignant exigeant !

  • Construction de barrage et d’étangs - avec toutes leurs normes d’ingénierie et de topographie; avec sa formation européenne antérieure, notre apprenti emmagasinait ce complément d'information ...comme un poisson dans l'eau !

  • Techniques de reproduction et grossissement de plusieurs espèces de poissons, crustacés et mollusques aquatiques - un "must" dans tout type d'élevage commercial;

  • Maladies affectant les organismes aquatiques - parasitologie et leurs cycles biologiques, bactériologie et virologie appliquées, certains déséquilibres environnementaux, ainsi que physiologie, histologie et cytologie relationnées; tous ces cours étaient délivrés par trois spécialistes ayant reçu des reconnaissances professionnelles au niveau national ;

  • Nutrition piscicole et "fish processing" (traitements/processus industriels du poisson depuis sa pêche/capture jusqu'au moment de sa vente/commercialisation3) - donnés par un praticien international (Prof. Richard Tom Lovell), ayant sa propre exploitation, ...qui devint son directeur d'étude; ce professeur Emeritus4 avait notamment dessiné et monté des unités/laboratoires en nutrition piscicole dans quelques institutions éducatives d'autres pays, comme l'important "International Centre for Living Aquatic Resources Management" (ICLARM; à Manille aux Philippines), associé au bureau asiatique de la F.A.O.5 et au "Freshwater Aquaculture Center" de la "Central Luzon State University" (CLSU; à Muňoz - Nueva Ecija aux Philippines) ; ce professeur lui imposa de suivre également des cours de nutrition "avancée" dans une autre faculté en matière de production animale ;

  • Limnologie6 et gestions de plans d'eauxdonné par un professeur qui travaillait étroitement avec l'administration fédérale et qu’on appelait aux 4 coins du pays pour sa compétence ;

  • Production de crustacés et mollusques marins - un cours qui fût illustré par la suite par plusieurs visites dans d'autres états (organisées par la faculté) et par des conférences données par d'éminents spécialistes (comme Mr. Cornélius Mock du célèbre laboratoire/écloserie côtière de grandes crevettes à Galvestone, Texas - une personnalité ayant été sollicité pour son expertise un peu partout dans le monde, notamment et répétitivement en République Populaire de Chine) ;

  • Economie aquacole - des notions fondamentales qui reliaient des croissances piscicoles en fonction d'investissements financiers suivant le degré d'intensification recherché, devant dans tous les cas aboutir à une aquaculture rentable;

    ...et encore bien d'autres enseignements enrichissants.

     Pendant deux années, il suivit tout ce qui était possible en son pouvoir et s'enferma dans la bibliothèque spécialisée de la faculté.

     Lorsque vous avez déjà travaillé sur le terrain dans le secteur privé, vous cherchez à vous orienter vers du plus "concret". Vous essayez d'éviter de consacrer trop de temps aux aspects "secondaires" ...qui seront probablement peu ou non utilisés plus tard !

Cette approche est de rigueur chez beaucoup d' US citizens: ils font bien souvent une formation générale du type B.Sc.7 (même s'ils s'engagent déjà vers un secteur de spécialisation basique); puis, ils travaillent quelques années et voient plus clair dans leurs attirances/intérêts; ils s'orientent ensuite, de manière plus réaliste, vers un M.Sc. de leur choix; enfin, s'ils cherchent à en connaître d'avantage, soit ils poursuivent directement un Ph.D., soit ils décident de retravailler pendant un temps et seulement après s'orientent vers cette formation plus pointue de Ph.D. Et la société là-bas reconnaît et apprécie l'expérience déjà acquise entre ces différentes étapes pour accéder à un statut académique intéressant.

     Pendant ces années, notre étudiant demanda plein de détails aux professeurs les mieux armés dans leur secteur. C'est aussi là que vous vous rendez compte de la valeur de ces éducateurs, de l'apport de leur enseignement, du réalisme de leurs recherches et de l'intérêt porté à leur domaine de spécialisation.

     Après six mois, il fût repéré par trois professeurs qui lui proposèrent des "assistantships"8 pour les aider dans leurs tâches hebdomadaires. Cela allégea considérablement les lourdes "fees" (droits universitaires ou coût pour être autorisé à suivre les études) à charge de tout étudiant « étranger »9. Comme il s'intéressa fortement à la "nutrition" (de par son importance en production intensive10), son directeur lui proposa aussi de fabriquer des aliments pour poissons à la station expérimentale et d'aider certains doctorants dans leurs recherches (notamment au laboratoire en matière d'ingrédients spécifiques à incorporer dans les diètes expérimentales en utilisant du matériel industriel). Toutes ces expériences se révélèrent hors-prix pour les retombées ultérieures.

     Enfin, il fit la pratique de sa thèse en élevant pendant 6 mois plusieurs milliers de poissons dans 30 étangs et compara les paramètres nutritionnels essentiels des « pellets » (granulés ou concentrés pour poissons) avec ceux de la chair des poissons en fin de croissance économique11. L’interprétation des résultats fût d'un grand enseignement, principalement sur certaines considérations à prendre en compte en matière d’engraissement et coût de revient.

     Deux ans plus tard, il obtint un « certificate » (diplôme) de « Master of Sciences in Fisheries and Allied Aquacultures ». Comme la moyenne de tous ses examens dépassait les 90 %, cela lui valut une reconnaissance au mérite de l’université.

     Son directeur de thèse lui proposa alors de travailler pendant une année pour un projet d'intérêt commercial entre l’université et l'industrie produisant des aliments pour "catfish" (poisson-chat ou silure), une carte maîtresse dans l’économie du sud (états du Mississippi, Missouri et Alabama). Les conclusions de cette belle coopération montrèrent clairement les limitations en apport de certains ingrédients peu chers, sans influencer négativement les tests organoleptiques12 concernant la chair des poissons d'élevage. Ceci avait évidemment une grande répercussion pour les producteurs fournissant à la chaîne des "fishburgers" (l'équivalent de nos "hamburgers chez MacDonald, mais avec du poisson) sur cet important marché.

     Cette nouvelle expérience amena à en connaître bien d’avantage, ...toujours avec cette soif d'apprendre. A l'époque, c'était l'essor de la "crevetticulture", notamment au Texas, en Ecuador, Thaïlande, Chines ...parmi les plus importants. Et les besoins alimentaires de crustacés (en taxonomie, phylum des "décapodes") a ses spécificités. Donc, rentrer dans le domaine de ces animaux à 5 paires de pattes devenait encore plus attractif !

     Ceci fera l'objet d'un prochain épisode.

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1  Master of Science.

2  Doctor of Philosophy.

3  Cela englobe notamment les normes d'hygiène (régulation du F.D.A. ou Food and Drug Administration), la salaison, le fumage et autres saumures/conditionnements, l’emballage, la congélation et le transport.

4  ("Émérite") Dans le système universitaire nord-américain et des pays anglophones, désigne un professeur qui a contribué de façon significative dans son domaine d'application et qui jouit d'un nombre d'avantages (comme par exemple, l'exemption de donner des cours pour pouvoir mieux se consacrer à la recherche; mais dans notre cas, ce professeur aux nombreux "awards" (récompenses/prix/lauréats), n'a jamais cessé de donner des cours et menait à la fois une recherche appliquée qui débouchait la plupart du temps sur des résultats repris directement par l'industrie du "catfish" (poisson-chat ou silure) dans les états du sud.

5  Food and Agriculture Organization.

6  Partie de la biologie qui étudie la science des eaux continentales (ce qui la différencie de l'océanographie). C'est l'analyse écologique appliquée à ces eaux qui subissent des variations saisonnières en formant des stratifications thermiques. C'est donc l'examen physique, chimique et biologique tourné vers un intérêt capital : la qualité biologique de ces milieux qui comprennent lacs, rivières et eaux lacustres.

7  Bachelor of Science.

8  Aide rémunérée par la faculté elle-même, avec un minimum 13h de prestation/semaine ...une véritable aubaine pour un étudiant qui s’autofinançait!

9  A cette époque, il y avait deux tarifs en vigueur pour pouvoir suivre des études au niveau académique aux USA: d’un côté, les ressortissants de l’état où se trouvait l’institution (dans notre cas, l’Alabama); de l’autre, tous ceux qui venaient des autres états du pays, ainsi que tous les étrangers ...qui payaient 3 fois plus (il y a 35 ans, autour de 8-10.000 US dollars par année universitaire; 1 année minimum pour un « Master » en Aquaculture (travail pratique sans thèse)/2 années obligatoires pour un « Master of Science » en Aquaculture/3 années pour un « Philosophiae Doctor» (Doctor of Philosophy).

10  Le coût des concentrés (pellets) représente souvent 50% du budget annuel dans toute production piscicole commerciale intensive ; à l'importance du coût d’écloserie (culture de microalgues), il se réduit autour de 35 % pour les crevettes des types Penaeus et Machrobrachium.

11  La croissance “économique” est le temps mis par un animal pour atteindre un poids commercial correspondant à un moment d’engraissement (moment optimum de pêche) qui tend à se stabiliser malgré un supplément d’alimentation plus important. En fait, elle correspond à son point d’inflexion sur sa représentation courbée (rarement linéaire) lorsqu’on met en rapport “quantité d’aliment” (donné) versus “croissance pondérale”.

12  Propre à agir sur les récepteurs sensoriels lors de la dégustation; durant son séjour à Auburn, il fit partie d'un comité pour tester (goûter) comparativement la chair des poissons et détecter d'éventuels "geosmins" = composés organiques issus de goûts/arômes terreux ou provoqués par certaines bactéries.

 

Quelle est le deuxième caractère du mot tm03u8j ?

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