II. Communication hors-ligne

Rédigé par Aquideas Aucun commentaire
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Application de certains additifs utilisés dans les crevettes congelées

Second hors ligne - Bonjour, merci encore pour cette article. J'ai vu dans un documentaire à la TV que les crevettes en France étaient en grande majorité importées, surgelées. Dans ce cas, il semble que les crevettes doivent passer dans un bain de sulfite... ou de je ne sais quoi. Pourquoi les industriels font-ils ça? Puisque vous les vendez vivantes, vos crevettes n'ont a subir aucun traitement du genre... Pourquoi ne fait-on pas d'avantage la promotion de ce type de produit ? N'est-ce pas pourtant la seule solution pour disposer de crevettes dont la texture et le goût a été préservé (sans parler de l'usage abusif de sulfites!)

     C'est bien vrai que plus de 90% des crevettes consommées en France proviennent de l'étranger (comme la République de Chine), mais plus particulièrement de régions tropicales (essentiellement Équateur, Panama, Brésil, Mexique, Sénégal, Mozambique, Madagascar, Thaïlande, Bangladesh, Viêt Nam, Indonésie et Inde). Toutes ces grandes crevettes (gambas) ne peuvent être acheminées que par congélation étant donné que les transports sont trop lents pour les commercialiser "vivantes" sur notre marché intérieur.

     Or ces crustacés, comme tout produit provenant de la mer, se dégrade très vite après la sortie de leur milieu naturel (eau de mer). Ainsi, leurs bonnes graisses et huiles ont tendance à s'oxyder rapidement. Ceci se traduit par un noircissement du céphalothorax1, car l'hépatopancréas2 continue à émettre des enzymes juste après la mort ...qui salissent les organes environnants. Donc, à côté des nécroses bactériennes un peu partout sur la carapace, la partie antérieure de la gambas peut prendre un aspect peu présentable. C'est la raison pour laquelle la commercialisation de ces crustacés aux USA se fait "head-off" (sans la tête) pour éviter toute contamination.

     Pour empêcher que toutes ces oxydations apparaissent, ils faut donc leurs apporter des anti-oxydants. C'est par ailleurs une obligation dans le règlement sanitaire de l'Union Européenne (Bruxelles) en matière d'importation. C'est donc la raison pour laquelle juste après leur récolte, et éventuelle cuisson, on pulvérise ou plonge toutes ces crevettes dans un bain de solutions préventives comme le (méta)bisulfite de sodium (un sel de sulfite ou E223 ; le sodium ou Na+1 vient du latin Natrium qui lui-même vient du grec Nitron). Ce n'est toutefois pas le seul conservateur3 utilisé dans le traitement industriel des espèces pêchées ou élevées en mer ! Mais ce produit issu de l'industrie chimique peut aussi interférer avec notre santé (c'est un allergène), notamment sur les produits sexuels naturels, et est suspecté d'être aussi neurotoxique, c'est-à-dire qui peut affecter notre système nerveux.

     Sachez aussi qu'en congélation, tous les crustacés perdent une partie de leur eau au-delà de 15 jours/3 semaines (vérifié maintes fois durant nos pratiques au laboratoire). Ce phénomène est très courant étant donné que les importateurs achètent de grosses quantités de crevettes la plupart du temps plusieurs semaines (voir des mois) avant leur mise en vente au détail. Ainsi pour compenser cette perte en poids ...qui pour eux se traduit par une perte d'argent, des importateurs peu scrupuleux ajoutent également un rétenteur d'eau. C'est notamment le cas du STPP (tri-polyphosphate de sodium4ou E451) qui utilisé en trace (c'est-à-dire en très faible quantité) retient l'eau à l'intérieur de la chair. On peut ainsi se retrouver à devoir payer 10-20% en poids d'eau additionnée lors de l'achat de vos crevettes importées ! Mais ce produit chimique peut causer une irritation aiguë de la peau et donc un contact prolongé doit être évité. Enfin, il est également suspecté d'être neurotoxique. La durée d'application (plusieurs secondes à quelques minutes) du STPP sur les produits de la mer (à leur sortie de l'eau ou après cuisson) dépend de la salinité et de leur poids. Il peut donc affecter la saveur et qualité des crevettes. Ainsi, bien que l'étiquette puisse le mentionner comme ingrédient, le client ne se rend pas toujours compte du danger que cela peut représenter ...même en toutes petites quantités !

     Aujourd'hui, on commence à se rendre compte des effets pervers de tous ces additifs chimiques industriels acceptés par la législation. Voyez ce que l'on fait avec certains poissons pêchés dans les mers plus froides ou élevés en cage (notamment en Scandinavie): la télévision révélait tout récemment que certains d'entre eux étaient rachetés en très grosses quantités par une grande nation asiatique ...qui ensuite les injectait d'eau au moyen de micro-piqûres synchronisées, ensuite les réexpédiait (en poids plus lourds) vers l'Europe... Tout cela génère évidemment beaucoup de devises ...que vous payez au détail pour une proportion plus grande en "eau" ...ce qui est une véritable arnaque !

     C'est une des raisons pour laquelle les crevettes "vivantes" produites dans nos trois départements du sud-ouest resteront toujours plus recommandables pour la santé, car elles ne sont pas traitées (sinon, elles ne pourraient pas être maintenues en vie lors de leur livraison).

     Toutefois, il y a deux autres aspects qui peuvent également influencer la qualité de leur chair:

     D'une part, les élevages normaux et "bio" qui utilisent des granulés industriels - En recevant facilement cet aliment "complet", la crevette ne cherche plus à faire travailler intensivement ses fibres musculatures et donc sa chair est plus molle lors de la récolte.

     D'autre part, la composition-même du granulé qui sert à l'alimentation - Ce concentré est en fait un mélange de farines (unies au moyen de chaleur) et d'un liant5 pour sa stabilité dans l'eau (la crevette mange une première fois, puis peut revenir une seconde fois sur les mêmes lieux plusieurs heures plus tard). Ainsi, on retrouve parfois des goûts dans la crevette, pas toujours agréables, liés aux ingrédients incorporés à leur alimentation artificielle. Nous étions d'ailleurs parvenu à influencer la chair des poissons en leurs donnant un excès d'ingrédient ciblé (recherche appliquée financée par la US Catfish Farmer Association opérant dans 4 grands états du sud).

  • Ainsi, un excès d' huile de porc (peu coûteuse) dans l'aliment pour poisson avait permis de détecter un goût très prononcé de ...porc (eh oui) dans la chair du poisson-chat (silure ou catfish) ! C'était bien-entendu inacceptable pour l'industrie alimentaire. Nous avons dû donc déterminer le pourcentage maximum à inclure dans l'aliment pour ces poissons ...sans être pénaliser par le consommateur !

[ Note: l'auteur a fait partie là-bas d'un panel pour évaluer tous ces goûts rares que l'on pouvait détecter lors de la consommation de tous ces animaux aquatiques (influence des ingrédients dans les pellets/concentrés; présence de géosmines dans la chair du poisson occasionnées par des microalgues/cyanobactéries planctoniques en suspension dans l'eau; mauvaises saveurs dues à la vase ingurgitée par le poisson lors de sa prise au filet le long du rivage; etc.) ]

  • Dans une autre expérimentation, un excès d' astaxanthine (caroténoïdes, extrait du maïs) avait permis chez ce même poisson de changer la couleur de sa chair du blanc ...au jaune ! Ce jaunissement était évidemment aussi préjudiciable pour faire des filets de poisson, car sur le marché son prix était beaucoup moins attractif pour l'investisseur !

     Dans un élevage non-industriel (comme chez AQUIDEAS6), vous n'avez pas tous ces problèmes et vous obtenez des crevettes goûteuses, car elles se nourrissent exclusivement des ressources naturelles produites dans l'étang. Et pour s'alimenter, elles dépensent énormément d'énergie pour attraper leurs proies (petits vers rouges, micro-faune et micro-flore), ...donc leur musculature travaille beaucoup et la texture de leur chair devient très ferme (c'est comme les poulets de "plein air" qui doivent trouver eux-même leur nourriture dans la prairie ou le bois).

     Ainsi, commercialiser des gambas "vivantes", en interdisant tout apport externe (engrais, granulés industriels, produits sanitaires préventifs/curatifs) rend toute la noblesse de ces belles crevettes. C'est comme cela que vous pouvez apprécier toutes les qualités organoleptiques sublimes que peuvent offrir ces crustacés. Et c'est par là que vous attirez à coup sûr les gastronomes !

     Pourquoi alors, n'informe-t'on pas suffisamment les consommateurs sur tous ces aspects litigieux?

     D'abord, parce que ce serait un peu fastidieux (en d'autres termes, par facilité) de devoir tout expliquer. Mais c'est surtout parce qu'il y a de très gros intérêts économiques de la part de lobbies.

     Pour leur travail sur place, les producteurs tropicaux sont franchement très mal rémunérés par les exportateurs ...qui proviennent la plupart du temps des pays plus riches. Ces éleveurs prennent des risques pour pouvoir élever leurs animaux. En achetant sans cesse "au rabais" dans ces régions tropicales, ces consortiums (pays nantis) possèdent un business bien huilé et surtout ...très juteux. Vous me direz qu'ils prennent encore plus de risques, que leur marchandise est hautement périssable, qu'il y a des infrastructures à assurer, etc. N'empêche, passer de 2-3 euros/Kg à l'achat (là-bas) à près de ...40-75 euros/Kg au détail de notre côté ...est un rendement fort intéressant ...tout en tenant compte des frais d'acheminement (importations) et toutes taxes incluses. Si par la suite, vous les offrez cuites et reconditionnées sur le marché du prêt à l'emploi ...vous pouvez imaginer les gains engrangés en plus !

     De plus, l'état ferme trop les yeux sur toutes ces irrégularités (additifs industriels) qui pénalisent durement la santé élémentaire des citoyens. En fait, il est d'une autre façon très intéressé par les gains dégagés par non seulement les transactions, taxes d'importations, droits de douanes... de tous ces produits de luxe (à la portée néanmoins ici de plus en plus de consommateurs), mais également par la T.V.A. non remboursable qui s'en dégagera lors de leur vente au détail (aux privés).

     Il faut toutefois reconnaître que là où on élève ces animaux en France, il est impossible de produire les quantités absorbées (en gambas "vivantes") par notre économie. Retenez que de toute manière, la quantité ira toujours à l'encontre de la qualité.

     Il faudrait simplement changer nos habitudes, car manger énormément de crevettes amène un excès de cholestérol ...qui n'est pas toujours très recommandable pour la santé7 ! Donc, il vaut mieux rester raisonnable et en manger peu (quantité non exagérée), mais plus saines d'un point de vue diététique (c'est-à-dire en qualité). On les apprécierait encore plus ...mais c'est comme toute bonne chose !

 

Références:

     - Black spots on shrimp, Louisiana Fisheries Forward magazine, 2015 (www.LaFisheriesForward.org)

      - Fish processing technology, Fisheries department, Auburn University, U.S.A.

     - Food additives (acidity regulators, antioxidants, colours, humectants and preservatives) in frozen fish, fish fillets, and fish products,

       including mollusks, crustaceans, and echinoderms, General Standard for Food Additives (CODEX STAN 192-1995)

     - Génie alimentaire/ANSES (http://www.genie-alimentaire.com)

     - https://fr.franceintheus.org/IMG/pdf/fiche_additifs_et_colorants_actualisation_2013.pdf

     - Légifrance: additif (https://www.legifrance.gouv.fr/)

     - Registry of toxic effects of chemical substances, National Institute for Occupational Safety and Health’s (NIOSH), U.S.A.

     - Test comparatif de crevettes tropicales, coûte que coûte !, UFC Que choisir, 2012 (https://aquaculture-aquablog.blogspot.com)

     - Webadditifs (https://www.les-additifs-alimentaires.com/E223-disulfite-de-sodium.php)

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1 Tête et thorax sont soudés chez certains invertébrés, comme les crevettes.

2 Ou "glande digestive".

3 On trouve également l'éthoxyquine (1,2-dihydro-6-éthoxy-2,2,4- triméthylquinoline; un peu plus efficace que les autres), le BHA (hydroxyanisole butylaté), le BHT (hydroxytoluène butylaté) et dans une moindre mesure l'acide ascorbique, l'acide propionique, l'acide benzoïque, l'acide citrique et plusieurs de leurs sels (bien-entendu, au sens chimique du terme). Mais pour ces derniers, il y a un problème économique (...une réalité industrielle) dans la technologie pour les produire ou stabiliser face notamment à l'humidité propre aux animaux aquatiques.

4 Composé inorganique pour préserver les viandes et produits de la mer.

5 Généralement de l'amidon de blé en régions tempérées ou de riz en régions tropicales.

6 Les productions chez AQUIDEAS (gambas subtropicales & huîtres affinées longuement) sont nettement inférieures à la plupart des exploitations régionales.

7 J'aurai bientôt l'occasion d'en discuter plus longuement dans un autre article.

Quelle est le quatrième caractère du mot ywzkfc ?

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