Décryptage d'un monde mystérieux : enigmatique République Populaire de Chine (9)

Rédigé par Aquideas Aucun commentaire
Classé dans : Assistance Mots clés : emploi republique populaire chine

(9ième partie)

     Nous avions maintenant répondu positivement à une demande d’assistance technique émanant d’Angleterre pour la grande Chine (People's Republic of China). Cette fois, nous étions impliqués ensemble dans cette mission de courte durée, mais elle paraissait intéressante. Par conséquent, nous avions dû passer par Londres pour récupérer nos billets d’avions et survoler le pôle nord pour arriver 13 heures plus tard à Beijing (Pékin).

     A l’aéroport, quelqu’un nous remit d’autres billets pour des vols intérieurs et nous dûmes attendre plusieurs heures avant de pouvoir poursuivre notre itinéraire. C’est ainsi que nous avions finalement atterri dans la province du Zhejiang, un peu plus au sud de Shanghai.

     Là-bas, une délégation chinoise nous attendait, mais à partir de ce moment elle nous prit en charge durant plus de 3 semaines. Elle était notamment composée du directeur d’une entreprise de pêches régionales, d’une responsable en communication et d’une jeune traductrice (anglais/mandarin et plusieurs dialectes régionaux).

     Cependant, le voyage était encore loin d’être terminé et nous parcourûmes durant une journée complète - en camionnette - une contrée essentiellement campagnarde. Nous sommes passés par la ville de Rui'an, puis avons atteint la te en face d'un archipel.

Nous allions enfin commencer réellement notre mission.

     Parmi les nombreuses sollicitudes, voici celles qui nous ont demandé le plus d’attention :

     En fait, le jour suivant, nous prenions un bateau de pêche pour l’île de Nanji, à deux heures de la côte. L’entreprise, qui possédait un atelier de pompes et réparation de moteurs pour ce type de bateau, souhaitait diversifier ses activités auprès des pêcheurs de la région et envisageait de développer un projet aquacole en utilisant ce qui pouvait l’être.

     Nous nous trouvions dans une zone non polluée, mais les petits villages de pêcheurs blottis au fond des criques étaient comme figés dans le temps ...peut-être par manque d’occupation, certainement par manque d'inspiration. C'est là qu'il fallait que ce qui avait été vu ailleurs devait être utile à ce petit coin perdu dans ce grand pays !

     Il fallut donc d’abord inspecter les lieux, puis en détecter les quelques rares ressources et moyens disponibles pour y parvenir. Ensuite, nous proposâmes quelques alternatives basées sur des expériences pertinentes. Il y eu bien des discussions sur les écloseries, les cages, l’intensification de tel ou tel élevage ou du grossissement des espèces basé sur leur régime alimentaire: carnivore, omnivore, herbivore ou ne se nourrissant que de phytoplancton ...la chaîne est complexe, mais vitale pour être efficace. Était-ce réellement rentable à long terme ...étant donné les connaissances plus ou moins connues sur le contrôle de leur reproduction pour ne pas perturber la nature ? Il y eût aussi bien d'autres sujets abordés en relation avec l'impact sociale, car un projet n'est pas que "technique": il y a aussi tout l'aspect "humain" qu'il faut considérer c'est-à-dire la main d’œuvre, les qualifications et leurs familles, l'infrastructure, etc....sur lequel on doit pouvoir construire !

     Plus tard - en Europe et à leur demande, nous envoyâmes un complément d’informations techniques aux responsables de cette entreprise.

     De retour sur le continent, on nous a ensuite demandé de donner une conférence et des exposés, notamment à l'important Pingyang Institute, où l'on forme des enseignants, entre autres dans les secteurs de la pêche. Le thème demandé était beaucoup plus général et il fallait démontrer qu'il y avait un vrai potentiel dans la région, en particulier en aquaculture côtière et continentale. Parmi l'importante audience, nous eûmes le plaisir de constater la présence du Bureau régional des Cultures Aquatiques, celle du Comité provincial de la Communauté des Sciences de l'Agriculture, ainsi que quelques hauts fonctionnaires du gouvernement local. Un grand intérêt fût noté par toutes les questions posées après l'exposé, peut-être aussi un peu teinté de ...curiosité. De toute manière, nous devions remplir notre mission SANS nous préoccuper de politique !

     Plus tard, nous fûmes également invités par des étudiants au cursus avancé en sciences de la mer, principalement dans l'élevage d'espèces aquacoles. Ceux-ci nous "bombardèrent" littéralement de questions techniques fort spécifiques. Malgré une traduction relativement difficile, nous essayâmes d'être le plus clair possible dans toutes nos explications concernant la logique et les mécanismes impliqués tout en étant conscients que beaucoup de nos arguments méritaient d'être approfondis. En effet, nous étions ...très limités dans le temps ! Notre seul espoir fût que tous ces éclaicissements puissent déboucher par la suite sur un développement de concepts innovants pour la région.

     Puis, la camionnette nous emmena pour un autre périple en direction de Wenzhou.

     Nous passâmes la nuit dans une petite ville rurale. Le soir, un taxi nous emmena au centre très animé de la ville. Effectivement, beaucoup d'échoppes improvisées avaient envahi le parc central en fête et la population en quête de renouveau déambulait calmement. Mais lors de notre passage, les gens s’écartaient doucement pour laisser passer, puis nous regardaient avec beaucoup d'attention ...parfois même, des parents nous amenaient des enfants pour nous observer avec insistance ...ce qui nous fît beaucoup rire ! Ce ne fût que lorsque nous entrâmes dans un restaurant (à l’invitation de notre délégation, tout en haut d'une ancienne hôtellerie) que le responsable nous dit que nous étions seulement les troisièmes "blancs aux yeux ronds" que les autochtones voyaient venir chez eux !

     Ce soir là, nous goûtâmes à plein de petits mets distribués sur un grand plateau tournant trônant au centre d'une grande table ronde. C'était de véritables délicatesses des côtes de chez eux, ...la plupart étant servis CRUS, donc sans les avoir passés par la flamme ! Il y avait ainsi plein de petits mollusques et une faune très diversifiée qui selon nos guides sortaient tout droit du sable des plages proches à marée basse. Découverte qui nous montrait la richesse des eaux régionales.

     Après ce copieux repas, nous décidâmes de rejoindre nos pénates en prenant un peu d'air frais, car j'en éprouvais personnellement un grand besoin. Nous rentrâmes par le moyen le plus en vogue dans le coin, c’est-à-dire en "cyclo-pousse", un tricycle à deux places ...décapotable (avec l'arrière et une toiture protectrice bâchée) qui se déplace à la force des ...jarrets d’un homme !

     Mais au début de la nuit, je fus pris de violentes crampes stomacales. Sans tarder, notre interprète me donna une crème à ingérer (dans une sorte de mini-tube à dentifrice). Je lui fis confiance et le lendemain, je me réveillai comme si rien ne s'était passé la veille. Même si je n’en connaissais pas la composition, cette posologie chinoise avait été rudement efficace !

     Un aspect - qui fait souvent partie de notre expertise - est le fait qu’il faut prendre connaissance des espèces trouvées dans les eaux environnantes et les tester (goûter) pour s’en faire une meilleure idée, surtout d’un aspect organoleptique1. Car ce que l'on souhaite développer doit plaire aux autochtones, et si ce n'est pour "déguster" localement, il faut considérer d'éventuels produits d’acceptation régionale ou nationale, ou encore pouvant être développés à plus long terme pour l’exportation.

     Puis, nous fûmes invité à découvrir une ferme-coopérative plus à l'intérieur des terresles dirigeants souhaitaient faire un peu de pisciculture (élevage de poissons). En fait, ils voulaient récupérer des résidus de leur propre exploitation et - si l’occasion s’en présentait - utiliser certaines autres ressources peu coûteuses trouvées localement.

     C'est ainsi qu'on leurs a suggéré de recycler quelques déchets organiques qui offraient une valeur nutritive certaine pouvant être incorporés dans l’alimentation des espèces aquatiques proposées. C’était le cas de quelques céréales, fourrage et dérivés de petits élevages déjà opératifs sur leurs terres.

     De plus comme nous avions observé l'existence environnante d'écrevisses, nous leurs avons montré tout l’intérêt d’intégrer ces animaux (à cinq paires de pattes) aux propriétés extrêmement intéressantes. En effet, ces crustacés (très sensibles à la moindre pollution) possèdent un haut contenu en acides gras polyinsaturés (c'est-à-dire de très bonnes graisses pour notre corps) et oméga trois (ω3 ; pour équilibrer dans notre organisme les trop nombreux apports d' ω6 ingérés). Nous leurs avons communiqué ce qui se faisait en Louisiane aux U.S.A. : comment obtenir les géniteurs dans la nature, en assurer l’élevage tout en tenant compte de leur besoins spécifiques dans l’alimentation, les récolter et traiter les produits finis après récolte (temps de cuisson, conditionnement, prévention et présentation ...comme l’obtention de soupes pleines de saveurs nutritives).

     Un facteur qu'il ne faut jamais ignorer est le manque de tradition, c'est-à-dire l'habitude de consommer un produit ou le préparer sous certaines formes. Mais par expérience, nous savons que l'introduction de nouvelles initiatives/procédures peut souvent susciter un nouveau développement commercial.

     Enfin, la délégation nous conduisit plus au nord de cette belle province, dans la Péninsule de Yuhan.

     Ici, il s’agissait d’améliorer le rendement (l’engraissement) de poissons élevés en cages. Déjà construites, ces dernières n’utilisaient que des matériaux naturels trouvés localement, comme du bambou ou balsa, ainsi que des cordages de chanvre. Il y eu bien des échanges sur la façon d’élaborer les concentrés en fonction d’un nombre de critères, comme la texture, composition, distribution et fréquence ...pour qu’ils soient efficaces. Puis, il fallut déterminer les équipements (machines) à utiliser et où les trouver sur le marché national.

L’envie de suivre les meilleures consignes se lisait visiblement sur le visage des responsables, malgré certaines difficultés de pouvoir traduire la terminologie technique ...bien nécessaire pour être précise et comprise !

     Ce que la pauvre traductrice a pu souffrir pour se faire comprendre ! Trouver les mots « justes » pour comprendre et être comprise par les principaux intéressés. Essayez un peu de l’imaginer : traduire en direct ...parfois pendant de longues heures  ! Mais l'important, n'était-ce pas de communiquer des pratiques qui fonctionnaient déjà en d’autres lieux ? Pour pouvoir arriver à un résultat concret, il fallait également convaincre et susciter des vocations nouvelles ...dans un monde aquatique qui nous fascine encore aujourd'hui. Nous étions là pour coopérer à un développement par l’innovation et la diversification dans une région pas toujours au courant de ce qui se faisait en dehors des frontières de leur pays, peut-être même hors de leur propre province ou région.

     Nous lui devions beaucoup de reconnaissance pour tous ses efforts répétés, souvent appuyés par une mallette de dictionnaires ! En effet, son domaine habituel de traduction se limitait à des conversions plus générales, pas du tout spécialisée, qui plus est dans le décryptage d'un monde sous l'eau particulièrement mystérieux...

     Plus loin dans une baie tranquille, les autorités maritimes nous exprimèrent le souhait d’initier quelques activités nouvelles, comme voir naître une ostréiculture professionnelle. La faisabilité d'y faire croître des huîtres commerciales était bien là, mais avec certaines précautions. Il y eu donc des suggestions, plans et recommandations pour y parvenir. De nouveaux échanges eurent lieu ...et à nouveau des explications, ainsi qu’une demande de compléments techniques à envoyer après notre retour sur le vieux continent.

     Des amitiés se sont ainsi créées ...ce qui est tout-à-fait normal lorsque les gens cherchent à solutionner leurs problèmes et qui en plus sont extrêmement sociables et gentils. Comment ne pas répondre positivement à leur demande ...à moins d'être un "ours" (et encore, ce point de vue est largement interprété par l'humain) !?

     Le gros problème est qu’en 1997 nous étions encore à un moment de grand isolement national et les échanges se faisaient toujours avec une prudence extrême et une difficulté administrative certaine. Il y avait non seulement la barrière de la langue2, mais en plus il y avait beaucoup de prévention de la part des fonctionnaires du parti ...avec laquelle nous devions sans cesse compter.

     Toutefois, nous avons été surpris par l'envie d'apprendre de ceux qui nous entouraient et la simplicité de leur approche. Il y avait aussi beaucoup de spontanéité dans leur façon de réagir, comme à une occasion ...ce magnifique bouquet de fleurs reçu au terme d'une causerie dans un énorme amphithéâtre bondé de collégiens.

     Force est de constater que dans beaucoup de secteurs, les ruraux de cet énorme pays font souvent appel à leur bon sens (logique) et ont énormément de connaissances pratiques qu’ils se transmettent oralement de génération en génération. Tout ce savoir-faire pourraient bien être enseigné en Europe pour produire localement. Si les conditions existent, si la volonté de les exploiter se fait sentir et surtout si la responsabilité professionnelle est au rendez-vous pour obtenir des produits de qualité, il faudrait relâcher beaucoup de nos contrôles administratifs ...souvent exagérés, ineffectifs, parfois inutiles.

     Lors de notre visite, nous avions aussi trouvé que dans ces régions plus isolées il y avait beaucoup d’activités "intégrées" associant certaines productions à d'autres parfaitement compatibles. Cela s'était fait naturellement par transmission orale provenant d'une tradition ancestrale. Cette façon de procéder compensait ainsi à de nombreux manquements "industriels" (pas toujours intéressants d’un point de vue purement éthique). Elle favorisait aussi là-bas tous les circuits courts, afin de pouvoir résorber d'éventuels gaspillages alimentaires ! Ceci contraste grandement avec nos villes, énormes agglomérations qui font pratiquement tout venir de l'extérieur ...avec les pertes que nous connaissons ! Nous dirions même que bien souvent, les ruraux vivent beaucoup plus en harmonie avec la nature qui les entoure ...même si leurs normes de production doivent être parfois plus préventives face aux aléas des infections. C'est aussi pour cela qu'ils nous avaient fait venir afin de rectifier certaines pratiques pouvant aboutir à un meilleur qualitatif.

 

     Lorsque nous sommes repassés par la capitale, nous avons été confrontés à un changement de programmation qui nous a permis de prendre un peu de temps pour visiter quelques vestiges historiques universellement connus en d'autres lieux.

     Nous avons ainsi pu découvrir la fameuse "Cité Interdite". Située en plein centre de Beijing, ce grand complexe (bien préservé) est composé de temples aux toitures majestueuses et d'anciens quartiers aux bâtiments allongés. Il y a aussi des cours intérieures, escaliers impressionnants, portes énormes, trônes dorés et boiseries élégantes noires et rouges. Ce haut lieu de l'histoire chinoise était la résidence principale des anciens empereurs et de son entourage. A l'ère féodale, ce palais impérial représentait le centre administratif de l'État et son accès était interdit au peuple.

     Nous nous sommes également rendus sur la grande "Muraille de Chine" ...qui se voyait aussi très bien par les hublots de l'avion (et non de la lune, comme on le clame souvent). C’est une œuvre de défense magistrale construite par des millions d'hommes qui avaient été enrôlés de force (beaucoup sont morts à la tâche) et à qui il faut rendre hommage pour le très long et impressionnant édifice en grandes briques qu'ils nous ont légué !

     Parenthèse professionnelle UNIQUE dans nos péripéties vécues.

---------------------------------------------------

1 Caractéristiques physiques (comme la longueur des fibres) et gustatives (comme la détection d’une éventuelle saveur fangeuse dans le muscle = la chair pouvant être détectée suite à un mauvais dégorgement).

2 Un minimum de 5.000 sigles doivent être maîtrisés pour commencer à comprendre le Mandarin. De plus, chaque sigle possède plusieurs intonations ...signifiant des choses bien différentes ! Nous étions très loin de cette performance et nous nous contentions de répondre souvent ..."che che" (merci) un peu partout !!!

Quelle est le premier caractère du mot rmu3lq ?

Fil RSS des commentaires de cet article