Centrale nucléaire et production aquatique (1 de 2)

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     A plusieurs occasions, j’ai eu le privilège de pouvoir visiter ou de me procurer une documentation sur quelques centrales nucléaires en France, Belgique, Irlande et USA. Vous me direz mais pourquoi vous intéressez-vous à ce genre d’industrie ...que l’on critique souvent ...sans en connaître la plupart du temps son fonctionnement.

     Ayant passé la moitié de ma vie en régions tropicales, je me suis naturellement porté vers les espèces ichtyologiques d’eaux plus chaudes, même si en Europe les espèces tempérées font la priorité. Toutefois, une constatation est flagrante : la croissance des espèces tropicales est généralement fulgurante. Si de plus, elles sont herbivores ou omnivores, cela va encore plus vite pour atteindre la valeur marchande (commercialisable). Donc, avec des températures plus élevées, le développement de ces animaux s'accélère. Mais attention, il y a tout de même des limites à ne pas dépasser, car avec des excès les organismes peuvent en souffrir, stagner et même mourir1. Prenez le cas des fougères : en France, leur taille ne dépasse guère plus de 1m20. Mais en région tropicale, ces mêmes plantes sont arborescentes et avoisinent les 20 m de hauteur (observées en Costa Rica et au Brésil). C’est vraiment très impressionnant ! Même chose avec les carottes dans ces contrées humides et chaudes : elles sont parfois énormes ...même si leur texture est beaucoup moins dense, moins concentrées en nutriments comme nous les connaissons sur notre vieux monde.

     De retour en Europe, nous cherchions donc à développer une activité piscicole plus axée sur la récupération d’énergies naturelles ou industrielles. Durant notre prospection, nous avons ainsi découvert beaucoup de lieux pouvant éventuellement offrir des opportunités avec des eaux comprises entre 24-32°C. Cela incluait les eaux géothermales, des eaux de refroidissement industrielles, ainsi que celles de refroidissement de centrales nucléaires. Le tout était de trouver une source stable, non contaminée, rejetée, perdue ou non utilisée et surtout bon marché (abordable de coût).

     Dans une première approche, nous avons découvert les eaux de refroidissement provenant de centrales nucléaires. Dans un prochain article, il sera question d’eaux géothermales et autres alternatives face au gaspillage énergétique de certaines activités professionnelles. Mais ici nous entrons dans une phase de récupération industrielle à des fins purement aquacoles.

     Écologiquement parlant, il y a de réelles opportunités dans ce très beau secteur de spécialisation, mais souvent les politiques ne permettent pas de les développer ...si elles-mêmes ne sont pas directement intéressées !

Comment fonctionne une centrale nucléaire ?

     Au départ, il faut induire la fission nucléaire2 et l’entretenir. Tous les noyaux atomiques se composent de particules élémentaires, essentiellement les protons3 et les neutrons4. Lorsqu’un neutron libre entre en collision à vitesse adéquate avec un noyau atomique lourd (uranium5, plutonium), il est absorbé et le noyau lourd se divise en deux parties principales ; simultanément, de l’énergie est dégagée et se présente finalement sous forme de chaleur et de radiations radioactives et le noyau libère quelques neutrons qui, à leur tour, peuvent diviser de nouveaux noyaux. Cette succession de ruptures de noyaux est appelé réaction en chaîne.

La fission nucléaire

     Les parties du noyau atomique subsistant après la fission sont appelées produits de fission.

     Mais dans le réacteur, les neutrons libérés qui sont initialement animés d’une grande vitesse doivent être ralentis pour pouvoir engendrer de nouvelles fissions.

     Donc, dans un réacteur nucléaire, une réaction en chaîne contrôlée produit de la chaleur. Cela nécessite de la matière fissible (ou fissile), un modérateur (ralentisseur de neutrons), un système d’évacuation de la chaleur, des dispositifs de réglage et de sécurité, ainsi qu’une protection entourant le réacteur. La fission nucléaire est déclenchée et arrêtée au moyen de barres de contrôle qui captent les neutrons. Si la réaction en chaîne est maintenue à un niveau constant dans le réacteur, on dit que cet état est celui qui correspond au fonctionnement d’un réacteur à puissance constante.

     Une centrale électrique à combustion fossile comporte une chaudière consommant du charbon, du gaz ou du diesel. Une centrale nucléaire comporte une chaudière nucléaire composée essentiellement du réacteur consommant la matière fissile (ou fissible) et de ses circuits associés. Mais dans les deux cas, la vapeur produite actionne une turbine qui est couplée à un alternateur et la transformation de l’énergie mécanique en électricité a lieu dans ce dernier.

     De fait, la production d’énergie nucléaire est protégée par un minimum de trois circuits de refroidissement – totalement indépendants les uns des autres (c’est-à-dire sans aucun contact entre eux). Tous ces circuits d’eau et liquide de refroidissement ne sont en aucun cas contaminé par les radiations, car les conduits sont revêtus par des matériaux (comme le plomb) qui protègent contre les rayonnements. Le premier circuit doit éliminer suffisamment de chaleur pour pouvoir refroidir le réacteur (cœur où a lieu la fission nucléaire) qui se trouve déjà dans une piscine ; le second circuit refroidira le premier circuit ; enfin, le troisième circuit refroidira le second, en ramenant la température suffisamment basse pour que les autres circuits puissent être remis en circulation.

     Au lieu d’être rejeté directement à la rivière, c’est ce troisième circuit qu’on va utiliser pour encore récupérer les calories restantes : il va être mis au contact (SANS échange direct) de bacs, tanks ou (plus généralement) raceways6 pour mener une production aquatique en eau plus chaude mais contrôlée (c’est-à-dire NON tempérée).

     A continuation, voici un schéma des trois circuits de refroidissement que l’on retrouve dans une centrale nucléaire :

Comment se fait le refroidissement d’une centrale nucléaire ?

     Toutes les centrales thermiques (charbon, diesel, gaz et énergie nucléaire) ne convertissent en électricité que 30-40 % seulement de la chaleur disponible, le reste devant être rejeté. Ce rendement relativement faible résulte d’une loi naturelle fondamentale et inévitable qui est définie par le second principe de la thermodynamique7 (dit aussi principe de Carnot). Pour comparer, sachez que le rendement d’un moteur automobile atteint seulement ±10 %.

     Ainsi après avoir transmis une partie de son énergie à la turbine, la vapeur produite dans un réacteur traverse le condensateur (voir le schéma ...comme dans une chaudière conventionnelle), où elle est condensée sans contact direct par de l’eau de refroidissement amenée de l’extérieur. Ce processus est exécuté de la manière la plus efficace et la plus économique au moyen d’eau provenant d’une rivière, d’un lac ou de la mer.

     Il faut cependant signaler que dans les réacteurs (pour une même puissance utile), il faut généralement évacuer environ 50% de plus en calories (par rapport à celui d’un chaudière). Néanmoins, la technologie évolue et essaie d’améliorer son efficacité.

Quelles sont les répercussions du refroidissement en utilisant l’eau de rivière ?

     Ce refroidissement direct au moyen d’eau de rivière entraîne inévitablement un léger réchauffement du cours d’eau au niveau du rejet. Cela est particulièrement vrai lorsque le débit de la rivière est insuffisant. Toute hausse et variations de la température de l’eau de rejet peut ainsi affecter tout un écosystème aquatique, notamment la disparition d’espèces autochtones (animales comme végétales), de nombreux troubles dans le cycle biologique des espèces locales et même des perturbations dans la reproduction de certains poissons et crustacés. C’est la raison pour laquelle on a favorisé la construction de tours de refroidissement ...les énormes et larges cheminées que vous pouvez observer au loin, comme depuis les autoroutes A10 (centrale de Dampierre) et A62 (centrale de Golfech).

     Ainsi, ces tours sont la meilleure solution pour les emplacements où il n’existe pas suffisamment d’eau afin de protéger l’environnement aquatique.

     Les tours de refroidissement du type humide sont les plus utilisées. L’eau de refroidissement venant du condenseur ruisselle dans un courant d’air de sens opposé et s’évapore en partie (2-3%). Quant à l’eau restante (97-98%), elle perd sa chaleur au cours de ce processus et peut à nouveau être utilisée. Seule la faible quantité d’eau évaporée est donc remplacée en permanence.

     Mais ce refroidissement du type plus naturel (courant d’air par effet de cheminée) peut également être atteint avec une circulation forcée par des ventilateurs. Le choix entre les deux procédures dépend des considérations technico-économiques locales. Enfin, d’autres systèmes de refroidissement sont à l’étude pour trouver des applications utiles à cette chaleur résiduelle.

 

Références :

  • Centrale nucléaire de Tihange (SEMO), Electricité de France/Trabel (Belgique), 1971.

  • Documentation technique personnelle, 1986.

  • L’énergie nucléaire, éd. Association Suisse pour l’Energie Atomique (ASPEA), 1973.

  • Précis d’énergie nucléaire, éd. Wesmael-Charlier, 1968.

  • www.futura-sciences.com/

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1Par exemple, un excès de température dans l’eau provoque une évaporation très élevée et une concentration de sel (NaCl) qui peut être fatale aux animaux. Ainsi en Charente Maritime, les températures excessives de l’air ambiant (34-38°C) expérimentées à la mi-juin 2022, ont eu pour effet que les gambas ne rentraient pas facilement dans nos verveux (filets). Généralement avec de telles chaleurs, elles restent dans le fond des étangs, car la vase les protége ...en espérant qu'elles aient pu résister à la hausse de salinité. Avec une diminution de la teneur dissoute en oxygène (respiration) et une  forte concentration en sel (forte évaporation à la superficie des étangs), l'environnement inhibe indéniablement la croissance de ces crevettes subtropicales.

2La fission nucléaire est l'éclatement d'un noyau (atomique) instable en deux noyaux plus légers et quelques particules élémentaires.

3Un proton est une particule subatomique portant une charge électrique élémentaire positive (leur nombre détermine l’élément chimique).

4Un neutron est une particule subatomique de charge électrique nulle (leur nombre détermine l’isotope).

5L’Uranium naturel est un mélange de trois isotopes dans les proportions approximatives suivantes : 99,19 % d’ 238U, 0,74 % d’ 235U et 0,07 % d’ 234U. C’est l’ 235U qui intéresse plus particulièrement les centrales.

6Raceways (de l’anglais) = canal (généralement construit en parpaings ou béton) d’eau courante servant à élever des poissons ou produire des (micro)algues.

7C’est-à-dire l’irréversibilité des phénomènes physiques, en particulier lors des échanges thermiques. Ce 2nd principe (ou loi) thermodynamique fait apparaître la notion d’entropie habituellement assimilée au concept d’un désordre qui ne peut que croître au cours d'une transformation réelle (en fait, les particules basiques de la matière deviennent de plus en plus lâche et se déplace de façon désordonnée).

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